Anouar Brahem : oud
François Couturier : piano
Klaus Gesing : clarinette basse
Björn Meyer : basse
OSI - Orchestra della Svizzera Italiana, Pietro Mianiti : chef d'orchestre
CD1 :
Improbable day
Ashen sky
Deliverance
Souvenance
Tunis at dawn
Youssef's song
CD2 :
January
Like a dream
On the road
Kasserine
Nouvelle vague
La musique de "Souvenance", pleine de grâce et de mystère, tour à tour hypnotique, austère et d’une grande force dramatique, a été enregistrée en 2014 – six ans après le dernier album sur ECM du grand maître de l’oud Anouar Brahem, "The Astounding Eyes of Rita".
“Ça m’a pris beaucoup de temps d’écrire ce répertoire” reconnaît Anouar Brahem, précisant avoir senti son monde intérieur et émotionnel entièrement monopolisé par les bouleversements politiques survenant au tournant de l’année 2011 d’abord en Tunisie puis dans ses pays voisins. Des vagues extraordinaires de changement, avec leur cortège d’espoirs et de peurs incommensurables. “Je ne prétends pas qu’il y ait un lien direct entre les compositions et les événements qui se sont déroulés en Tunisie,“ explique Anouar Brahem, “mais j’ai été profondément marqué par ce qui s’est passé...”.
Les nouvelles directions prises par Anouar Brahem pour sa musique permettent de réintroduire François Couturier au sein du groupe, fréquemment engagé dans un dialogue subtil avec un orchestre à cordes. Les cordes, d’une grâce extrême et tout en transparences miroitantes, apportent à ce répertoire des effets de textures et de couleurs chatoyantes sur quoi les quatre solistes – et avant tout le jeu d’oud unique d’Anouar Brahem – se détachent, comme en relief.
Ce double album a été enregistré dans le studio de Lugano en mai 2014 et produit par Manfred Eicher.
Contexte
Depuis la parution, cinq ans plus tôt, sur ECM, de "The Astounding Eyes of Rita", le grand maître tunisien de l’oud Anouar Brahem n’avait rien publié. Son nouvel album "Souvenance", plein de grâce et de mystère, tour à tour hypnotique, austère et d’une grande force dramatique, vient rompre avec éclat ce long silence phonographique.
"Ça m’a pris beaucoup de temps d’écrire le répertoire de cet album" reconnaît Anouar qui, durant cette période, a mis de côté l’idée d’un autre disque, projetant de rendre compte de la progression de son quartet "nordique" qui, de fait, n’a cessé, au fil des concerts, de gagner en cohésion et en dynamisme.
"J’ai ressenti à un moment la nécessité de m’affronter à quelque chose de nouveau. "Mais survinrent alors en Tunisie les grands bouleversements politiques qui, au tournant de l’année 2011 – avec leur cortège "de peurs, de joies et d’espoirs incommensurables" –, embrasèrent la région comme une traînée de poudre. Entièrement absorbé par les événements qui, jour après jour, d’insurrection en contre-insurrection, voyaient les soulèvements populaires progressivement saper les fondations du pouvoir dictatorial, Brahem reconnaît avoir senti alors son monde intérieur et émotionnel entièrement "monopolisé par la politique". Le moment n’était pas propice à l’écriture : "J’ai dû attendre que la pression retombe pour reprendre le travail."
"Souvenance" est un joli mot qui exprime l’idée d’un souvenir lointain, mais le titre de l’album (tout comme ceux des morceaux) n’a été trouvé que dans l’après-coup. Jusqu’au moment du mixage, les pièces n’étaient identifiées que par la date de leur composition. "Je ne prétends pas qu’il y ait un lien direct entre les compositions et les événements qui se sont déroulés en Tunisie", explique Anouar Brahem, "mais j’ai profondément été marqué par ce qui s’est passé..."
En tant que compositeur, Brahem a toujours suivi son intuition, allant même jusqu’à se surprendre lui-même en considérant les directions prises par sa musique : "Il semblait probable que le piano tiendrait un rôle dans ces nouvelles pièces, du simple fait que plusieurs d’entre elles ont été composées sur cet instrument. Mais pendant que je travaillais sur les maquettes, l’idée d’un orchestre de musique de chambre s’est imposée progressivement dans mon esprit. En octobre 2013, je suis allé à Paris pour commencer à travailler avec François Couturier et le projet est devenu plus concret. Je suis allé voir Manfred [Eicher] pour lui présenter quelques démos et il m’a convaincu de continuer dans cette voie."
Anouar entreprit alors de reconfigurer totalement son orchestre, réintroduisant au cœur du dispositif le piano de son fidèle collaborateur François Couturier (figure clé de quelques chefs-d’œuvre antérieurs comme "Le pas de chat noir" et "Le voyage de Sahar"), pour l’engager le plus souvent dans un dialogue subtil avec un orchestre entièrement composé de cordes. De fait, cet orchestre à cordes, d’une grâce extrême et tout en transparences miroitantes, apporte à ce répertoire des effets de textures et de couleurs chatoyantes sur quoi les quatre solistes (et parmi eux avant tout Anouar Brahem en personne, dont le jeu d’oud n’a jamais semblé aussi personnel) se détachent, comme en relief. "Dans ce projet j’ai le sentiment d’improviser différemment. C‘est le caractère des pièces qui l’induit. Souvent, quelques notes suffisent. Tous les instruments ont mis du temps à trouver leur place dans cette musique." Ce défi fut tout particulièrement difficile à relever pour les musiciens venus du jazz, habitués à s’approprier l’espace pour exprimer leurs propres émotions.
"Dans "Souvenance", cet espace d’expression existe, mais il est plus subtil, plus orienté. Au fur et à mesure que l’écriture se faisait plus précise et que les arrangements prenaient forme, le rôle de la basse de Björn est devenu plus important et central. La responsabilité de la clarinette basse de Klaus est plus difficile à définir ici, mais c’est incontestablement un élément important dans le dispositif, et il est très difficile pour l’auditeur de saisir quelles sont les parties écrites et les séquences improvisées". Pour la première fois dans "Souvenance, Brahem s’est essayé à l’écriture pour cordes. Le compositeur autrichien Johannes Berauer, un collègue de Klaus Gesing, est venu en Tunisie spécialement pour l’assister dans ce travail et cosigner les orchestrations.
"Il était essentiel de travailler en étroite collaboration pour rester fidèle à l’esprit des compositions et ce, page après page." (La seule exception est la version orchestrale de "Nouvelle vague", pièce précédemment enregistrée sur Khomsa, dont l’arrangement qui clôture ce nouvel album est l’œuvre du compositeur estonien Tõnu Kõrvits.) "Il était primordial pour moi de donner aux cordes une fonction organique dans la musique. Tout dans ce travail était nouveau pour moi, ma formation musicale m’a initié exclusivement à la musique traditionnelle arabe. Je n’avais aucun schéma compositionnel en tête lorsque je me suis lancé dans cette aventure. Mais j’ai vite senti que je n’étais pas forcément très attiré par les effets de puissance et de volume que peut offrir un orchestre de ce type. Pour moi, il s’est avéré bien plus excitant d’improviser avec des cordes s’exprimant dans un registre ‘piano’ – là où le détail des sons et des textures, la délicatesse propre à la musique de chambre, est le plus sensible et émouvant." –.
Cet album a été enregistré dans l’Auditorium Stelo Mori de Lugano en mai 2014 avec l’Orchestra della Svizzera Italiana. Cet orchestre a une histoire riche et particulière. Richard Strauss a composé pour lui et des compositeurs comme Stravinsky ou Berio l’ont dirigé dans des interprétations de leurs propres œuvres. Récemment, l‘orchestre a enregistré une série d’albums en compagnie de la pianiste Martha Argerich.
“Le chef d’orchestre Pietro Mianniti a été d’une grande aide, en demeurant tout du long très réactif et à l’écoute de nos intentions. Et, bien sûr, Manfred dans son rôle de producteur a été déterminant lorsqu’il s’est agi de prendre des décisions. Deux ou trois fois on a été amenés à effectuer des changements de dernière minute concernant le répertoire. Il nous a fallu être très réactifs dans le temps très limité de la séance d’enregistrement."
Le 10 juillet 2014, lors du concert d’ouverture du 50ème Festival International de Carthage, Anouar Brahem, François Couturier, Björn Meyer et Klaus Gesing, accompagnés par le Tallinn Chamber Orchestra (bien connu des amateurs d’ECM pour ses contributions aux albums d’Arvo Pärt, Erkki Sven Tüür et Helena Tulve), ont créé "Souvenance" devant un public de 7500 personnes.
La première européenne de "Souvenance" se tiendra le 4 décembre au Prinzregententheater de Munich. Le quartet de Brahem sera là aussi, accompagné du Tallinn Chamber Orchestra.
Réactions de la presse
Indirectly inspired by the sociopolitical upheavals in his country over the last five years, the album assumes a muted cinematic sweep, with scant harmonic movement, but a wealth of shifting texture. […] The oud playing is infallibly strong, but some of the album’s more striking moments belong to Mr. Gesing, who knows how to suggest the strain of a human voice. Spread across two CDs, this is a work of tensile beauty, by turns hopeful and foreboding.
Meaning ‘remembrance’, ‘Souvenance’, is the Tunisian oud master’s new album after a five year gap following quartet recording ‘The Astounding Eyes of Rita’ also on ECM that also featured Gesing and Meyer. In reuniting his former colleagues, Brahem has written a commanding and all embracing set that seamlessly captures and portrays emotions ranging from despair to joy, and pessimism to optimism that shows a real depth of vision. […] This is a wonderful album and Brahem should be congratulated for bringing together such passion and emotion in a set that for all its serenity speaks volumes.
At the end of the day, that's what ‘Souvenance’ truly represents: a spiritual narrative that explores the depths of emotion and the furthest reaches of the human condition...in the most understated yet clarified way possible. Brahem may take more time between recordings these days, but when the result is as moving as ‘Souvenance’, it's clearly worth the wait as the years melt away and the music makes all other concerns irrelevant.
The marvelously empathetic strings are like active observers watching and serving the small group’s every whim and they do this expertly. ‘January’ beginning the second disc finds Couturier repeatedly marking out a small phrase, then ‘Like a Dream’ a big oud statement going deeper and more serious than before. ‘On the Road’ following is much more introspective Couturier again leading the ensemble off. ‘Kasserine’ – a city in Tunisia near Sidi Bouzid where the Tunisian revolution began – in this vein is like a lament at the beginning Brahem’s deft timbral facility a feat. Completed by ‘Nouvelle Vague,’ the strings just gorgeous in all their diffidence rising and falling tantalisingly at the beginning, a memorable album of Brahem’s music that deserves the highest praise.
Hinter dem scheinbar Statischen der von stabilen harmonischen Kraftzentren dominierten, zumeist bewusst karg instrumentierten Kompositionen verbirgt sich eine bemerkenswerte Vielfalt musikalischer Emotionen. Vieles blitzt hier nur kurz auf, bleibt aber als Subtext bestehen und gibt der äußerlich entwicklungsarmen Musik einen innendynamischen Spannungsgehalt, der das Hören zum Abenteuer macht.
Zwei CD-Seiten lang experimentiert er mit den Kontrasten von Opulenz und Reduktion, lässt seine feinziselierte Musik vorsichtig aufbranden, um Borduntöne herum kreisen, mal in Eintracht mit dem akustischen Gesamterscheinungsbild, dann wieder sanfte Kontraste bildend. […] Was letztlich improvisiert sei und was ausgeschrieben, meint der Künstler selbst, sei ab einem gewissen Punkt der Gestaltung unwichtig geworden. Die Wirkung der Kompositionen ist so oder so offen, pointiert über die gesamte Spanne der Musik zugespitzt und herausragend transparent und zugleich volltönend aufgenommen. Von daher. ‚Souvenance‘ ist ein Meisterstück.
Er nimmt das eigene Oud-Spiel weitgehend zurück und überträgt seine Klangvorstellungen stattdessen auf Kammerorchester, Klavier, Bassklarinette und Elektrobass. Schöne, weiträumige, unaufdringlich romantische Stücke in audiophilem Klang sind dabei entstanden.
Die auf zwei CDs verteilten mehr als anderthalb stunden Musik Bergen Wanderungen durch eine Welt, die weder abend- noch morgenländisch ist, sondern einfach menschlich, sehr individuell und zutiefst berührend.
Eine magische, mystische, in vielen Farben schimmernde Musik. Sie oszilliert zwischen schamanenartigen Beschwörungen und romantischen Balladen, freien Ton-Poemen und keltischen Blues-Adaptionen, flottem Gypsy-Swing und schwebenden Rubato-Hymnen.
Econome en notes mais fort en thèmes […] envoûte et cultive le mystère.
Está assim, em permanente enunciação esta pequena obra-prima de espírito e estilo: da vida, reùne o console e o desconsolo, a ilusão e a desilusão, mas, como é costume com Brahem, carrega a mágoa rebuçada em melancholia […] This small masterpiece of style and spirit: the life, that brings together the consolation and desolation, the illusion and disillusion, but, as is usual with Brahem, carries the sweet sorrow of melancholy...
Distinctions
ƒƒƒƒ, "Télérama" (France)
5★, "All About Jazz" (États-Unis)
CD du mois, "Audio" (Allemagne)
5★, "Marlbank" (Angleterre)
5★, "Fono Forum" (Allemagne)
5★, "Stereo" (Allemagne)
5/5, "Dagens Nyheter" (Suède)
Choc, "Classica" (France)
Indispensable, "Jazz News" (France)
4★, "Expresso" (Portugal)